Un atelier philo au collège, au CDI ou en classe

Montaigne écrivait : « On a grand tort de peindre [la philosophie] inaccessible aux enfants, et d’un visage renfrogné, sourcilleux et terrible. » En France, la philosophie est une matière obligatoire au lycée depuis Napoléon. On peut parler là de spécificité française ! Depuis quelques années, le débat philo (atelier ou café philo) est étendu aux collégiens, aux élèves de primaire et même aux petits de maternelles ! Au CDI, en classe d’éducation civique et morale, en français…, la philosophie est accessible à tous et remporte notamment un grand succès auprès des élèves dits « difficiles ». Comment conduire ces ateliers ? Le blog Universalis a recensé quelques articles, livres et bonnes pratiques.

 

De nombreuses compétences sont mises en œuvre

La tenue d’un débat philo fait intervenir de nombreuses compétences exigées dans les programmes scolaires et dans le socle commun de connaissances. Le débat peut ainsi trouver sa place dans le cadre des matières enseignées, en classe ou sur la pause méridienne, selon un mode de fonctionnement que l’enseignant aura choisi.
Le débat philo valorise la parole de l’élève. Débattre, c’est prendre le temps de réfléchir à des sujets qui concernent la condition humaine, en s’écoutant et en respectant la parole des autres. Débattre au collège, c’est aussi apprendre à s’exprimer de façon maîtrisée et constructive en s’adressant à un auditoire.
Dans le cadre d’une préparation au débat, on pourra proposer aux élèves une recherche autour du thème discuté et la lecture de quelques articles ; les élèves mettront ainsi en œuvre les compétences attendues en EMI : évaluer l’information, identifier une source, prélever l’information, questionner et problématiser, rechercher, trier, communiquer, restituer.

 

Organiser le débat : les indispensables

L’organisation de la classe

Pour un débat, il est indispensable de casser l’organisation « en classe ». En effet, comme l’écrit François Galichet(1) , « la disposition traditionnelle […] rend pratiquement impossible toute discussion véritable ; elle incline les élèves à se tourner vers le maître, et celui-ci à endosser son rôle habituel de référent et de pôle pour toutes les interventions des élèves. Il est donc capital d’adopter une disposition – en cercle, en carré ou en rectangle, peu importe – où les élèves se font tous face et où le maître est intégré dans le groupe sans avoir une place privilégiée »(2). Si la météo est clémente et s’il n’y a pas de bruit environnant, on peut ainsi tenir le débat philo à l’extérieur en demandant aux élèves de s’asseoir par terre, en cercle.

Le groupe (nombre d’élèves)

Un groupe de 10 à 15 élèves est parfait, mais on peut tout à fait tenir un débat philo sur une classe entière.

La posture de l’enseignant

Il s’agit là d’un point essentiel pour faire de cet atelier un succès. L’enseignant est en position de retrait. Il lance le sujet et laisse les élèves débattre entre eux. Il veille à n’intervenir que pour relancer le débat quand la discussion s’enlise. En effet, même inconsciente, la tentation est grande pour un enseignant de reprendre son rôle habituel en interrogeant les élèves. À la fin du débat, il pourra néanmoins conclure avec les élèves pour proposer un résumé de ce qui a été dit. Certains, comme Michèle Sillam(3), affichent cette retranscription dans le CDI pour donner à d’autres élèves l’envie de participer aux prochains débats.

La gestion de la parole

Un bâton de parole permettra d’équilibrer les interventions, mais il est également important de ne forcer ni brusquer personne. Au début, certains élèves hésiteront à s’exprimer. Il faut leur laisser le temps de se familiariser avec l’exercice.

Le sujet

Le débat portera sur des concepts et non sur l’actualité. On pourra réfléchir à la liberté (la liberté, est-ce faire ce que je veux ?), l’amitié (qu’est-ce qu’un ami ?), le temps (prendre son temps, est-ce perdre son temps ?). On peut travailler sur la tolérance ou le racisme, mais il faudra s’interroger sur la notion abordée ! Par exemple : Que signifie être normal ? Tout le monde est-il normal ? Suis-je extraordinaire ?…
Il est possible, bien sûr, de trouver nombre de sujets sur Internet : de nombreux enseignants ont fait l’expérience et ont partagé leurs sujets sur le Web. François Galichet a mis en téléchargement gratuit le PDF de son livre. Vous y découvrirez des sujets, mais aussi des réflexions qui peuvent apporter beaucoup au débat !

 

Une recherche documentaire ou des lectures pour les élèves

Doit-on préparer le débat philo ? Cela n’est pas obligatoire, mais il peut être intéressant de faire lire aux élèves des articles adaptés à leur âge, surtout si l’on doit débattre de sujets ou de notions qu’ils ne connaissent généralement pas, comme l’euthanasie. Dans l’encyclopédie Universalis Junior Edu, les élèves pourront lire des articles avant le débat ou en introduction de celui-ci. En voici quelques-uns (liste non exhaustive), dont certains sont d’ailleurs en accès libre :

On pourra proposer quelques œuvres des Petits Platons qu’on aura mis en rayon du CDI. Cette maison d’édition s’est spécialisée dans l’édition d’ouvrages pour la jeunesse (jusqu’à la classe de troisième) sur les philosophes. De vraies réussites qu’on peut aussi dévorer en tant qu’adultes !

 

(1) François Galichet est agrégé en philosophie et ancien professeur à l’université de Strasbourg.
(2) François Galichet, Pratiquer la philosophie à l’école, 15 débats pour les enfants du cycle 2 au collège, Nathan, 2004.
(3) Michèle Sillam est formatrice pour des ateliers philo, animatrice de groupes et professeur de mathématiques. 

 

Une bibliographie pour les enseignants

PDF du livre de François Galichet
• Michèle Sillam, De la philosophie au collège, Le café pédagogique, 2011
• Site Les petits Platons


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